Communiqué de presse

De nouvelles observations révèlent un disque protoplanétaire déchiré par ses trois étoiles centrales

3 septembre 2020

Une équipe d'astronomes vient pour la première fois de démontrer que des groupes d'étoiles sont capables d'altérer leur disque de formation planétaire, de le déformer et de le scinder en anneaux inclinés. Cette nouvelle étude suggère que les planètes exotiques, semblables à Tatooine dans Star Wars, sont susceptibles de se former au sein d'anneaux inclinés dans des disques courbés autour de leurs étoiles. Ces résultats ont été obtenus à partir d'observations menées au moyen du Very Large Télescope de l'Observatoire Européen Austral (le VLT de l'ESO) et du Vaste Réseau (sub-) Millimétrique de l'Atacama.

 

Notre Système Solaire est remarquablement plat, l'ensemble des planètes orbitant dans le même plan. Ceci n'est toutefois pas toujours le cas, notamment des disques protoplanétaires situés en périphérie d'étoiles multiples, tel l'objet de cette nouvelle étude : GW Orionis. Ce système, situé à quelque 1300 années-lumière de la Terre dans la constellation d'Orion, est composé de trois étoiles et d'un disque périphérique déformé, déchiré.

Nos images révèlent le cas extrême d'un disque tout sauf plat, déformé et déchiré comme en témoigne la découverte d'un anneau incliné originaire du disque” souligne Stefan Klaus, professeur d'astrophysique à l'université d'Exeter au Royaume Uni, auteur principal de l'étude publiée ce jour au sein de la revue Science. L'anneau incliné se situe à l'intérieur du disque, non loin des trois étoiles.

En outre, ce nouveau travail de recherche révèle que l'anneau interne se compose de poussière à hauteur de 30 masses terrestres, ce qui devrait suffire à former de nouvelles planètes. “Toute planète formée au sein de l'anneau incliné sera caractérisée par une orbite fortement inclinée autour de l'étoile. Nous estimons être en mesure de découvrir à l'avenir de nombreuses planètes decrivant des orbites obliques, très éloignées, dans le cadre de campagnes d'imagerie planétaire, menées au moyen notamment de l'ELT”, l'Extremely Large Telescope de l'ESO qui entrera en fonction à la fin de cette décennie, précise Alexander Kreplin de l'université d'Exeter, par ailleurs membre de l'équipe. Puisque plus de la moitié des étoiles peuplant notre ciel sont nées avec un ou plusieurs compagnons, un nouveau champ d'investigation s'ouvre à nous : une population encore inconnue d'exoplanètes pourrait orbiter autour d'étoiles sur des trajectoires particulièrement inclinées et distantes.

Pour parvenir à ces conclusions, l'équipe a observé GW Orionis durant plus de 11 ans. Dès 2008, ils utilisèrent les instruments AMBER puis GRAVITY installés sur l'Interférometre du VLT de l'ESO au Chili, qui combine la lumière  en provenance des différents télescopes composant le VLT, afin d'étudier la danse gravitationnelle des trois étoiles du système et de cartographier leurs orbites. '“Il nous est apparu que les trois étoiles n'orbitent pas dans le même plan, et que leurs orbites ne sont alignées, ni les unes par rapport aux autres, ni avec le disque”, précise Alison Young des Universités de Leicester et d'Exeter, par ailleurs membre de l'équipe.

L'équipe a également observé le système au moyen de l'instrument SPHERE installé sur le VLT de l'ESO et du réseau ALMA dont l'ESO est partenaire, dans le but d'imager l'anneau interne et de confirmer son inclinaison. L'instrument SPHERE de l'ESO leur a également permis d'apercevoir, pour la toute première fois, l'ombre que projette cet anneau sur le reste du disque. Ils en ont déduit la forme tridimensionnelle de l'anneau et du disque dans son ensemble.

L'équipe internationale, composée de chercheurs du Royaume-Uni, de Belgique, du Chili, de France et des États-Unis, a ensuite combiné ses observations exhaustives à des simulations numériques afin de  comprendre ce qui était arrivé au système. Pour la toute première fois, ils furent en mesure d'établir un lien étroit entre les inclinaisons observées et l'effet théorique du déchirement de disque, suggérant ainsi que les attractions gravitationnelles conflictuelles exercées par les étoiles du système sur différents plans sont capables de déformer et de déchirer leurs disques.

Leurs simulations ont montré que l'inclinaison des orbites des trois étoiles pouvait causer la brisure, en anneaux distincts, du disque qui les entoure, confirmant ainsi les données d'observation. La forme constatée de l'anneau interne est également en accord avec les résultats des simulations numériques portant sur la brisure de l'anneau.

Il est intéressant de noter qu'une autre équipe ayant étudié le même système au moyen d'ALMA a introduit une variable supplémentaire dans son équation permettant de résoudre le système. “Nous pensons que la présence d'une planète entre les anneaux est requise pour comprendre les raisons du déchirement de l'anneau” précise Jiaqing Bi de l'université de Victoria au Canada, auteur principal d'une étude de GW Orionis publiée au sein des Astrophysical Journal Letters du mois de mai dernier. Son équipe a identifié trois anneaux de poussière dans les données d'ALMA, le plus extérieur d'entre eux étant le plus plus grand jamais observé au sein de disques protoplanetaires.

De futures observations menées au moyen de l'ELT de l'ESO et d'autres télescopes devraient aider les astronomes à mieux comprendre la nature de GW Orionis et à découvrir l'existence de jeunes planètes en formation autour de ses trois étoiles.

Plus d'informations

 

Ce travail de recherche a fait l'objet d'un article intitulé “A triple star system with a misaligned and warped circumstellar disk shaped by disk tearing” à paraître au sein de la revue Science.

L'équipe se compose de Stefan Kraus (Université d'Exeter, École de Physique & d'Astronomie, Royaume-Uni [Exeter]) Alexander Kreplin (Exeter), Alison K. Young (Exeter et École de Physique et d'Astronomie, Université de Leicester, Royaume-Uni), Matthew R. Bate (Exeter), John D. Monnier (Université du Michigan, États-Unis [Michigan]), Tim J. Harries (Exeter), Henning Avenhaus (Institut Max Planck dédié à l'Astronomie, Heidelberg, Allemagne), Jacques Kluska (Exeter et Institut d'Astronomie, KU Leuven, Belgique [KU Leuven]), Anna S. E. Laws (Exeter), Evan A. Rich (Michigan), Matthew Willson (Exeter et Université d'Etat de Géorgie, États-Unis), Alicia N. Aarnio (Université  de Caroline du Nord Greensboro, États-Unis), Fred C. Adams (Michigan), Sean M. Andrews (Centre d'Astrophysique | Harvard & Smithsonian, États-Unis[CfA]), Narsireddy Anugu (Exeter, Michigan et Observatoire Steward, Université d'Arizona, États-Unis), Jaehan Bae (Michigan et Institut Carnegie dédié à la Science, Washington, États-Unis), Theo ten Brummelaar (Le réseau CHARA de l'université l'Etat de Georgie, Californie, États-Unis), Nuria Calvet (Michigan), Michel Cure (Institut de Physique et d'Astronomie, Université de Valparaiso, Chili), Claire L. Davies (Exeter), Jacob Ennis (Michigan), Catherine Espaillat (Michigan et Université de Boston, États-Unis), Tyler Gardner (Michigan), Lee Hartmann (Michigan), Sasha Hinkley (Exeter), Aaron Labdon (Exeter), Cyprien Lanthermann (KU Leuven), Jean-Baptiste LeBouquin (Michigan et Université Grenoble Alpes, CNRS, IPAG, France), Gail H. Schaefer (CHARA), Benjamin R. Setterholm (Michigan), David Wilner (CfA), et Zhaohuan Zhu (University of Nevada, USA).

L'ESO est la première organisation intergouvernementale pour l'astronomie en Europe et l'observatoire astronomique le plus productif au monde. L'ESO est soutenu par 15 pays : l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Brésil, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, la France, l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la République Tchèque, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. L'ESO conduit d'ambitieux programmes pour la conception, la construction et la gestion de puissants équipements pour l'astronomie au sol qui permettent aux astronomes de faire d'importantes découvertes scientifiques. L'ESO joue également un rôle de leader dans la promotion et l'organisation de la coopération dans le domaine de la recherche en astronomie. L'ESO gère trois sites d'observation uniques, de classe internationale, au Chili : La Silla, Paranal et Chajnantor. À Paranal, l'ESO exploite le VLT « Very Large Telescope », l'observatoire astronomique observant dans le visible le plus avancé au monde et deux télescopes dédiés aux grands sondages. VISTA fonctionne dans l'infrarouge. C'est le plus grand télescope pour les grands sondages. Et, le VLT Survey Telescope (VST) est le plus grand télescope conçu exclusivement pour sonder le ciel dans la lumière visible. L'ESO est le partenaire européen d'ALMA, un télescope astronomique révolutionnaire. ALMA est le plus grand projet astronomique en cours de réalisation. L'ESO est actuellement en train de programmer la réalisation d'un télescope européen géant (E-ELT pour European Extremely Large Telescope) de la classe des 39 mètres qui observera dans le visible et le proche infrarouge. L'E-ELT sera « l'œil le plus grand au monde tourné vers le ciel.

Le Vaste Réseau (Sub-)Millimétrique de l’Atacama (ALMA), une installation astronomique internationale, est le fruit d’un partenariat entre l'ESO, la U.S. National Science Foundation (NSF) et le National Institutes of Natural Sciences (NINS) du Japon en coopération avec la République du Chili. ALMA est financé par l'Observatoire Européen Austral (ESO) pour le compte de ses Etats membres, la NSF en coopération avec le National Research Council du Canada (NRC), le National Science Council of Tawain (NSC) et le NINS en coopération avec l’Academia Sinica (AS) à Taiwan et le Korea Astronomy and Space Science Institute (KASI). La construction et la gestion d'ALMA sont supervisées par l'ESO pour le compte de ses Etats membres, par le National Radio Astronomy Observatory (NRAO) dirigé par Associated Universities, Inc (AUI) en Amérique du Nord, et par le National Astronomical Observatory of Japan (NAOJ) pour l'Asie de l'Est. L’Observatoire commun ALMA (JAO pour Joint ALMA Observatory) apporte un leadership et un management unifiés pour la construction, la mise en service et l’exploitation d’ALMA.

Liens

 

●       Publication scientifique

●     Modèle 3D interactif de la structure du disque et de l'orbite stellaire du système triple GW Orionis, déduit des observations (ouvrir avec Acrobat Reader pour correctement afficher les éléments interactifs)

●       Photos du VLT

●       Photos d’ALMA

●       Vous êtes scientifique et avez une histoire à raconter ? Présentez vos recherches

Contacts

Stefan Kraus
Associate Professor in Astrophysics, University of Exeter
Exeter, UK
Tél: +44 1392 724125
Courriel: S.Kraus@exeter.ac.uk

Alexander Kreplin
Postdoctoral Research Fellow, University of Exeter
Exeter, UK
Tél: +44 1392 725571
Courriel: A.Kreplin@exeter.ac.uk

Alison Young
Postdoctoral Research Associate, University of Leicester
Leicester, UK
Tél: +44 116 3736281
Courriel: alison.young@leicester.ac.uk

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Joerg Gasser (contact presse pour la Suisse)
Réseau de diffusion scientifique de l'ESO
Courriel: eson-switzerland@eso.org

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Ce texte est une traduction du communiqué de presse de l'ESO eso2014.

A propos du communiqué de presse

Communiqué de presse N°:eso2014fr-ch
Nom:GW Orionis
Type:Milky Way : Star : Grouping : Triple
Milky Way : Star : Circumstellar Material : Disk : Protoplanetary
Facility:Atacama Large Millimeter/submillimeter Array, Very Large Telescope, Very Large Telescope Interferometer
Instruments:AMBER, GRAVITY, SPHERE
Science data:2020Sci...369.1233K

Images

L'anneau interne de GW Orionis:  modélisation et observations de SPHERE
L'anneau interne de GW Orionis: modélisation et observations de SPHERE
ALMA and SPHERE view of GW Orionis (side-by-side)
ALMA and SPHERE view of GW Orionis (side-by-side)
Seulement en anglais
ALMA and SPHERE view of GW Orionis (superimposed)
ALMA and SPHERE view of GW Orionis (superimposed)
Seulement en anglais
GW Orionis in the constellation of Orion
GW Orionis in the constellation of Orion
Seulement en anglais

Vidéos

ESOcast 229 Light : Un disque protoplanétaire déchiré par ses trois étoiles centrales
ESOcast 229 Light : Un disque protoplanétaire déchiré par ses trois étoiles centrales
Artistic animation of the warped and torn apart disc of GW Orionis
Artistic animation of the warped and torn apart disc of GW Orionis
Seulement en anglais
Artistic animation of the stellar movements in GW Orionis
Artistic animation of the stellar movements in GW Orionis
Seulement en anglais
How GW Orionis got its ring (computer simulation)
How GW Orionis got its ring (computer simulation)
Seulement en anglais